Vous connaissez surement la théorie du Peak Oil, qui prévoit l'inéluctable décroissance de la production pétrolière à partir d'une période plateau que les experts ont du mal à estimer. D'un coté les pessimistes (ou optimistes, selon qu'on se place du coté de la planète ou des hommes) annoncent l'imminence du déclin de la production mondiale. Parmi ceux ci, citons par exemple Matthew Simmons, ou Eric Laurent, auteur de La Face Cachée du Pétrole. De l'autre coté, les optimistes (Georges Bush, le prince Abdallah d'Arabie Saoudite) tentent de rassurer la population en affichant des chiffres issus d'on ne sait quelle comptabilité, toujours opaque dans le milieu du pétrole.
Du pétrole au pain
Qu'en déduire pour nos petits besoins quotidiens ? La lecture de la presse internationale ne fait qu'alimenter un débat qui s'est instauré depuis que le prix du baril s'est envolé depuis un ou 2 ans. Comme toujours, peu de chiffres fiables, rien que des suppositions. Par contre, les effects indirects de l'imminence d'une pénurie pétrolière se manifestent déjà. Peut être pas forcément à cause d'une baisse de la production au niveau mondial (environ 85 millions de barils / jour) mais surtout, pour le moment, à cause d'une croissance de la consommation en Asie. Et ces effets se font sentir... en premier lieu sur le prix des denrées alimentaires, qui sont en train de subir une augmentation sans précédent. Encore un fois, il s'agit d'une problématique démographique : les chinois en ont marre de manger du riz, eux aussi veulent leur quota de viande fraiche, bien plus couteuse en énergie que les salades (1kg de viande de veau équivaut, en terme de consommation énergétique à un trajet de 200km en voiture) .. Associez y la conversion massive de l'agriculture industrielle à la production de biocarburants (pour remplacer le pétrole qui manque ou pour se donner la conscience d'énergies propres), et vous obtenez une conjoncture aussi étonnante qu'inquiétante : sur les 5 continents, les prix des denrées sont en forte augmentation et les stocks en forte diminution.
Kenavo les patisseries ?
Récemment, Lester Brown, analyste du Earth Policy Institute, détaillait au Sénat Américain cette tendance : "tout est prêt pour une concurrence directe sur le grain entre les 2 milliards d'humains les plus pauvres et les 800 millions qui ont une voiture." L'équation directe laisse planer la menace : les prix du grain vont peu à peu s'indexer sur le prix du baril de pétrole, qui a dépassé ce vendredi la barre des 70$. Jean Ziegler, rapporteur spécial de la Commission des Droits de l'homme de l'ONU pour le droit à l'alimentation, ne mache pas ses mots et dénonce l'hyprocrisie des occidentaux (USA et UE) qui font la promotion active des agro-carburants pour réduire leur dépendance énergétique. Pendant ce temps, la faim menace : après des années de déclin, le nombre d'affamés est soudainement de nouveau en augmentation. Chez les riches, on ne s'inquiète pas trop, quoique... Le beurre a pris 40% en moins d'un an : les galettes bretonnes et kouigns amans sont menacés d'extinction !
Source : The Independant, The fight for the world's food, Daniel Howden, 24 juin 2007