28 novembre 2007

Fin de civilisation ? La pénurie de resources minières et fossiles est sans aucun doute en train de préparer des bouleversements d'une ampleur inégalée depuis l'apparition des industries de la fin du 19e siècle, et le développement du 20e siècle. Mais ces bouleversements ne sont pas forcément porteurs de catastrophes répétées, comme le prédisent par exemple James Horward Kunstler (plus de pétrole) ou James Lovelock (plus rien à manger). Souvenez vous de Lester Brown : à la tête du Earth Policy Institute il publie régulièrement des chroniques inspirées de son ouvrage phare, PLAN B. Son dernier essai est une brillante illustration des pistes à suivre pour entamer une dynamique de croissance tenant compte des nouvelles conditions environnementales d'une planète complètement épuisée. Extraits.

Transformations gigantesques

Construire une nouvelle économie commencera par le déclin des industries en place et la structuration de nouvelles industries. La nouvelle économie marchera aux énergies renouvelables. Elle dépendra de modes de transports diversifiés, comme le bus, le rail, le vélo, au détriment de l'automobile. Tout sera recyclé [...]

Notre Commentaire : Lester Brown évoque alors la disparition du charbon : comment y croire alors qu'aux USA et en Chine , pour ne citer que les deux mastodontes, cette source d'énergie reprend du poil de la bête malgré son bilan environnemental désastreux ?

La conversion de l'industrie automobile, délaissant la combustion interne de carburants fossiles au profit de machines hybrides où l'électricité tiendra une part croissante, entrainera une restructuration massive avec création de nouvelles expertises. On n'échappera pas à une transformation des usines et des nouvelles formations pour les ingénieurs automobiles.

Nouvelles industries

La génération d'electricité éolienne est l'exemple d'une nouvelle industrie, composée de trois sous branches : fabrication des turbines, installation, maintenance. Actuellement au stade embryonnaire, elle prépare les fondations de la nouvelle économie de l'énergie. A moyen terme, des millions de turbines seront à l'oeuvre, transformant la force du vent en électricité bon marché, apportant revenus et emplois à de nombreuses communautés rurales tout autour de la planète.

L'énergie éolienne se généralisant comme source d'électricité "low cost", sera alors en mesure de lancer la nouvelle industrie de production d'hydrogène. Quand seront installées un grand nombre d'éoliennes, une grande capacité d'électricité sera largement disponible, la nuit par exemple quand l'usage diminue. Avec ce surplus gratuit, les propriétaires d'éoliennes pourront investir dans les générateurs d'hydrogène, qui à son tour pourra alimenter les centrales. L'énergie éolienne sera alors en mesure de remplacer le charbon, le pétrole et le gaz.

L'économie alimentaire sera elle aussi bouleversée, on s'en doute : L'aquaculture, secteur de l'industrie alimentaire qui a la plus forte croissance, croit de 9% depuis 1990. La culture des poissons omnivores comme les carpes, poissons-chat et tilapias, a de fortes chances de croitre rapidement tout simplement grâce à la capacité de ces poissons à convertir en protéines animales des produits agricoles (grain). [...]

L'industrie du vélo est une industrie en croissance : en 1965, la production de voitures était équivalente à la production de bicyclettes (20 millions). En 2003, la production de bicyclettes a monté à 100 millions par ans, à comparer avec les 42 millions d'automobiles. Cette croissance des ventes de vélo reflète l'enrichissement des populations asiatiques qui accèdent à ce niveau de pouvoir d'achat. Parmis les pays industrialisés, le modèle urbain de transports aux Pays Bas et au Danemark donne une idée du futur rôle des bicyclettes autour du globe.

L'usage croissant du vélo va générer un intérêt croissant pour l'assistance électrique au pédalage.

Notre Commentaire : que va-t-il se passer quand les pouvoirs d'achat des populations d'Asie atteindra, comme cela commence déjà chez les privilégiés des megalopoles, le niveau d'une automobile ?

Une autre industrie en croissance est celle des outils d'accroissement de la productivité de l'eau. Tout comme le dernier demi-siècle fut consacré à l'accroissement de la productivité des terres, le prochain demi-siècle se concentrera sur la productivité de l'eau. Les technologies d'irrigation vont se perfectionner, et le recyclage des eaux urbaines deviendra commun.

Le prix du pétrole croissant donne des arguments aux téléconférences [...] D'ici peu des milliers d'entreprises seront spécialisées dans l'organisation de téléconférences.

Autres industries prometteuses sont la fabrication de cellules photovoltaiques, construction de rails, plantation d'arbres. Pour les 1.7 milliards d'individus qui vivent sans électricité dans les pays en développement, la production massive de panneaux solaires est la meilleure solution. Dans les villes, la congestion du trafic et la pollution favorisera les restrictions et les municipalités devront se tourner vers le rail. Et les efforts de reforestation vont gagner de l'ampleur, transformant l'industrie de plantation forestière en acteur majeur de l'économie. [...]

Nouveaux Métiers

Transformer l'industrie éolienne en géant nécéssitera des milliers de météorologues du vent pour identifier les meilleures sites. Leur rôle dans la nouvelle économie sera comparable aux géologues du pétrole de l'ancienne économie.

Il y a une demande croissante d'architectes environnementaux concevant des batiments à faible consommation énergétique. Dans un avenir où l'eau manque, les hydrologistes seront sollicités pour étudier les mouvements de l'eau dans les sous sols et nappes phréatiques. Ils seront au centre de la gestion de l'eau.

Alors que le monde quittera l'économie du tout jetable, les ingénieurs se mettront à concevoir des produits entièrement recyclabes [...]

Autre besoin pressant dans les pays en développement : les ingénieurs sanitaires qui savent concevoir des traitements d'épuration sans eau, sans odeur, comme les toilettes à compost [...] Encore une demande croissante pour les agronomistes spécialistes des polycultures.

Notre commentaire : loin d'être naivement optimiste, Lester Brown s'inspire d'une réalité concrète : beaucoup de ces métiers sont déjà à l'oeuvre et se développement fortement.

Texte original :

http://www.earth-policy.org/Books/Seg/PB2ch12_ss6.htm